L'AME POSSEDEE
L’âme possédée
Quel chemin dois-je frayer pour arriver à ton port de consolation,
Quelle grêle dois-je faire éclater au temps de ma passion
Brûlante, pour que ton sourire éclaire ce ciel assombri,
Et ta voix sonore embrase ces timides et tristes cris.
Dans tes yeux, je vois des vagues qui déchirent mon âme
Voilée par de lugubres toiles et possédée par l’horreur de ton charme.
Hélas ! Mes larmes fondues dans le désert ne rejoignent pas
Ton sourire blanc, éclairé par l’unique lune de trépas
Car, il est défendu à ceux qui flamboient sous une pluie éternelle
Et appellent, dans leur profonde solitude, un cœur sourd et fidèle.
Ecoutes-tu ce sanglot ou plutôt ce dernier râle qui se dégage,
Dans l’ombre de ma chambre et s’évanouit dans l’orage ?
Oh mon cœur ! Laissez-moi franchir le seuil de cette aurore
Fulgurante, avant que l’automne revienne avec tous ses remords.
Mille fois, j’aspire à ton regard, à ton silence et à ton front
Ruisselant de joie comme une fleur dans la rosée auprès des troncs
D’un arbre qu’un vent arrache et jette dans la cendre,
Mais la plainte terrible persiste et le feu s’attise encore.
Ressens-tu ce chagrin qui brise ma mémoire et mon avenir ?
Me voir ainsi, oses-tu chanter avec nonchalance et rire ?
Qu’importe ! Tu serais toujours une part sanglante de moi-même,
Une image de blessure, un soupir d’amour que l’on aime.
Parfois, j’envisage ma fin au milieu d’un fleuve de sang
Où on distingue à peine un pâle visage flottant sans
Aucun espoir, et avec cette dernière force qui se déchaîne
Et tout au long de ce fleuve, j’aperçois des faces de haine
Qui se moquent de mon agonie et de cette passion perdue
Dans le néant de ma vie désolée, misérable et suspendue.
Pourtant, j’attends que ton ombre passe et surgit
Pour m’y attacher à jamais et oublier mes soucis ;
Et quand tu apparais, je crie en plein gosier :
« Arrêtes de me tracasser, arrêtes de me tuer
Tes chants ne m’éblouissent pas, tes cheveux ne me gênent pas
Regardes – je t’en prie – si je suis vivant ou pas
Reviens sur tes pas, contemples ce large fleuve où je m’exile
Ce drap rougeâtre où j’étouffe un désir inaccessible ! »
Et je me tais enfin pour ne pas dire que le destin poignant
M’a choisi pour être homme sans être amant.
Enfin, laisses-moi partir au hasard, au moins pour t’oublier
Tu sauras bientôt pourquoi je lance ce cri de brasier.
05 mai 2006